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VOYAGES D'ARTISTES ­- ALGERIE 03

Djazaïr, une année de l’Algérie en France

Commissaire de l'exposition / Jean-Louis Pradel

21 novembre 2003 - 28 mars 2004

Espace EDF Elektra. Paris

D'une dé-rive à l'autre. Vidéo DVD. Durée 7 mn. 2003 


A l’occasion de Djazaïr, une année de l’Algérie en France, la Fondation EDF, la direction des Affaires culturelles de la Ville de Paris et l’Association française d’action artistique (AFAA) présentent une exposition construite autour du thème de la rencontre. Composée d’œuvres inédites de 23 artistes, cette exposition offre au public un voyage en Algérie à travers les multiples facettes de l’art contemporain.

 

Commissaire de l'exposition / Jean-Louis Pradel

23 artistes, algériens de cœur ou d’origine, pour une exposition qui se veut un voyage réel ou

imaginaire dans l’Algérie contemporaine. Une création variée qui jette un pont entre deux capitales au

passé commun douloureux, et qui révèle la richesse d’une culture aux racines multiples.

Avec : Ianna Andréadis, Kader Attia, Nadia Benbouta, Samta Benyahia, Ammar Bouras, Philippe Cognée, Electronic Shadow, Ghazel, Rachid Koraïchi, Ange Leccia, Hiroshi Maeda, Tarik Mesli, Daniel Nadaud, Yazid Oulab, Ernest Pignon-Ernest, Bernard Rancillac, Mustafa Sadek Sedjal, Sélim, Saïah, Zineb Sedira, Karim Sergoua, Jacques Villeglé, Kamel Yahiaoui, Hellal Zoubir.

 

 

Algérie, art et dépendances

 

Les  hommes s'en vont admirer les cimes des montagnes

et les flots immenses de la mer et les vastes cours des fleuves

et les circuits de l'océan et les révolutions des astres

et ils se délaissent eux-mêmes.

Les confessions, saint Augustin.

 

     Si proche et si lointaine, l'Algérie, ce Sud qui habite les quartiers nord de nos métropoles, invite au voyage. Non pour changer de monde, mais pour tenter de le retrouver. Non pour renouer avec l'orientalisme ou satisfaire le goût du pittoresque et de l'exotisme, mais pour faire face à la vérité du temps. Après toutes les dates oubliées, portées disparues, refoulées ou glorifiées qui ont rythmé une furieuse histoire commune, l'année de l'Algérie en France permet de reprendre une conversation interrompue ces dix dernières années  par le silence et la peur, alors que s'égrenaient au jour le jour les bilans chiffrés des assassinats de la nuit. Ne filtrait de " ce pays de malheur " qu'une avalanche d'images de massacres et de pleurs, devenues si coutumières que la compassion tournait insensiblement à l'indifférence. A l'ombre du soleil fixe de l'information ne survivait qu'une communication à distance, quasi clandestine, téléphonique et virtuelle, où les paraboles des téléviseurs et Internet creusaient l'écart tandis que les visas se raréfiaient et qu'Air France ne desservait plus Alger.

(lire la suite).

    

Jean-Louis Pradel

Paris, août / septembre 2003


Carnet de Voyage, Série de 9 Dessins sur papier

Technique mixte. Dimensions 25 x 32,5 cm x 9

2003

Carnet de Voyage

Mon premier voyage en Algérie a d'abord été entrepris à travers l'Histoire, laMémoire et l'Imaginaire de l'Algérie, au milieu des rayons des bibliothèques, des livres, des images et des rencontres. C’était fin 1987, je venais de débarquer en France à la recherche de "l'autre".

L'année d'après, en octobre 1988, l'Algérie éclatait dans le sang. J'ai vécu cette "mascarade" de loin, face à mon téléviseur. L'effondrement du corps-social marque la rupture avec le partie unique qui ouvrait le "bal bordélique" de l'"aventure démocratique". Une remise en question s'opère dans ma démarche artistique et esthétique. En 1991, en quête de la mémoire confisquée, mon retour en Algérie avec un ami journaliste pour réaliser un documentaire me fait découvrir un pays bouleversé. J'ai rencontré quelques acteurs historiques de la guerre d'indépendance algérienne et, la caméra à l'épaule, j'ai marché dans Alger au milieu des manifestations… 

De ce voyage, j'ai ramené d'autres images vidéo d'où j'ai tiré deux films vidéo : NEJMA, l'éternel retour et Chronique d'une blessure, des images que j'ai réunis sous forme de "journal vidéo" où se mêlent mon histoire personnelle et la grande histoire du dérapage colonial et national.

Cette quête douloureuse me hante et me poursuit dans mon quotidien, ma vie et mon travail plastique.

L'année 1992 sonne le glas de l'"aventure démocratique". Le coup d'Etat en "Gris" plonge l'Algérie dans une spirale sanguinaire.

En 1996, j'atterris à Alger par accident, sans un rond, au milieu du chaos, noyé dans un silence de plomb. La caméra que j'avais sur moi est confisquée par la douane. Je rejoins Oran par miracle où je retrouve ma famille. Même désolation sur les visages. Les murs de la ville sont tapissés de ce qui reste des affiches des élections avortées de 1992. Je retrouve refuge dans le silence. Je rase les murs en plein jour. La nuit, il est hors de question de sortir. Après quelques jours, la peur au ventre, le coeur plein d'amertume, je quitte l'Algérie. L'Algérie rêvée n'était plus qu'un cauchemar. Elle honte mon travail plastique. Depuis, je ne me suis rendu chez moi que pour de brefs séjours. Aujourd'hui, je me nourris de l'écho du chaos que je vie de loin. Et, comme " passeur de mémoire ", je continue mon parcours à la marge, hors cadre.

Ma démarche plastique s'inscrit dans ce que j'appelle l'"esthétique bordélique", une notion qui recouvre l'environnement ambiantde la création artistique, caractérisé par l'uniformisation / mondialisée. Entre le Nord, où je pratique mon art, et le Sud, qui en est la matrice, j'explore un espace de conflits mais aussi de dialogues qui est Histoire et Mémoire, l'histoire de l'Algérie confisquée, dévoyée et détournée, et mémoire humaine malmenée. Je me considère comme un " passeur de mémoire ".

Dans cet échange et d'ouverture vers l'autre, l'esthétique bordélique doit se frayer une place dans l'art contemporain non pas comme une création de seconde zone (sous art indigène). Esthétique bordélique, oui mais pas une esthétique sous anesthésie.

 

SEDJAL Mustapha Sadek

Paris, 2003


 

D’une dé-Rive à l'autre

Installation

Il y’a trois sortes d’hommes

Les vivants, Les morts,et ceux qui vont sur la mer.

Aristote

 

Des Histoires vont et viennent, à travers le temps, l’espace et la mémoire des images d'archives de la nuit coloniale. Des êtres secroisent en des endroits improbables, portés pardes destins marqués du sceau de l’exil, de l’enfermement. Etranges destinées que celles de ces hommes et de ces femmes pris dans la tourmente de l’Histoire qui tisse sa toile. Revisiter notre Histoire et raviver la mémoire, tâches qui apparaissent aujourd’hui commesalvatrices, ne relèvent pas d'une mission aisée mais nécessitent une réelle prise en charge si ceux qui ont la charge de veiller à la pérennité de la nation sont convaincus de l’importance des dimensions culturelles et identitaires de notre peuple.

Suite à un naufrage ayant fait de nouvelles victimes, une dépêche de l’agence France presse précisait que les pateras, en raison de leur petite taille, sont indétectables par les radars conventionnels de l’armée espagnole et qu’elle chavirent facilement sous les vagues et les ventsparfois très violent du détroit de Gibraltar.

De 1993 à 2003, plus de deux mille personnes sont mortes noyées aux frontières de l’Europe, dans le détroit de Gibraltar, frontière entre la liberté et la mort.

Voyant l’écume de la mer, les gens l’ont prise pour de la bière

Quand la mer sera soûle, je lui offriraimon verre

Le bateau à pris le large, l’avion a gagnéle ciel,

Ma chance a été avalée par un poisson qui habite la mer.

Cheikha Rimitti

D'une dé-rive à l'autre. Vidéo DVD. Durée 7 mn. 2003